20/06/2015

New Wave maintenant

Livres et articles sont disponibles pour théoriser les démarches du postpunk et de la new pop, et tenter de les transposer à des pratiques musicales plus contemporaines. Pour la new wave, cet exercice est de loin beaucoup plus difficile : les divergences sémantiques entre les différents critiques ou historiens freinent lourdement le recoupement des sources. Il demeure un manque non négligeable d'écrits et d'analyses poussées du courant. Posons-nous tout de même sur ces questions : quels courants musicaux contemporains présentent une démarche analogue ?


En considérant la new wave comme la résultante de la rhétorique punk rejetant la old wave, le fait que cette dernière soit toujours vivante n'est pas un critère suffisant pour conférer à un quelconque revivalisme le même impact historique.


Où se trouve la forme actuelle d'un réalisme social tel que celui qui animait les observateurs de la new wave ?

Dans Missing links: Britpop traces 1970–1980 (2010), Andy Bennett tente de construire un continuum de narrations de la pop britannique. Il rappelle que dans les années 90, la britpop avait emprunté la porte ouverte par la new wave vers un esthétisme anglais hautement conscience de lui-même. Marquant ainsi un retour de cette tradition toute british qui mélange observation au vitriol de la vie quotidienne et mélancolie tragi-comique. A la différence que la new wave se voulait « moderne » alors que la britpop passe pour « rétrogressif » par sa tendance à fuir la nature multiraciale et technologique de la pop culture anglaise qui lui fut contemporaine, comme le rappel Simon Reynolds dans Bring The Noise (2007).


La décennie suivante des groupes post-britpop comme Kaiser Chiefs et surtout les Arctic Monkeys se rebranchèrent sur la puissance et la fluidité rythmique de la power pop, c'est-à-dire le versant des sixties que les groupes indie préfèrent ignorer au profit des guitares mélodiques. Les textes d'Alex Turner relevèrent de la new wave (des chansons d'amour et de désir avec du mordant et un brin d'amertume ; du réalisme social, de l'observation), et les débuts du groupe auraient aisément pu être rangés en 1979 aux côtés d'Elvis Costello, The Specials, Ian Dury et The Jam.


Dans les années 2000, des jeunes MC trouvèrent une alternative à la stagnation du britrap au moyen de la dance music, plus spécifiquement du UK garage. Pour Simon Reynolds, toujours dans Bring The Noise, Mike Skinner apporta à ce « garage rap » un vrai contenu, à côté duquel les autres rappers paraissent monothématiques : des observations fines, des contes pessimistes de la vie de tous les jours, rappelant Terry Hall et John Cooper Clark. Un appel à l'ambition dans l'esthétique et le contenu, se moquant des américanismes et soulignant son englishness par sa langue et sa musique.


Le punk-hop minimaliste des Sleaford Mods peut être évalué comme le nouveau moment de cette généalogie du réalisme social britannique. Avec un accent qui manque de glamour urbain, de lyrisme chantant et de romantisme rustique ; un des plus mal aimés du Royaume-Uni, dixit le critique philosophe Mark FisherEt avec l'urgence de The Clash et de The Jam traitée via le Wu-Tang Clan, Jason Williamson et Andrew Fearn articulent un regard sans compromis sur ces temps d'austérité.


Mise à jour 08/09/2020

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