18/03/2014

Britain's postpunk pop avant-garde

Retour sur l'article considéré comme l'origine de la définition usuelle du postpunk.

Au début des années 80, Greil Marcus fut envoyé à Notting Hill par Rolling Stone pour un rapport sur Rough Trade. Il en revint avec un article publié dans le numéro du 24 juillet 1980, annoncé en couverture par « England reinvents rock & roll (and it's better than ever) ».


It's Fab, It's Passionate,
It's Wild, It's Intelligent!
It's the Hot New Sound of England Today!


L'article traite de ce que Marcus nomme alors l'avant-garde pop postpunk britannique, dont le label indépendant était le centre vital.

Certaines des nouvelles musiques venues d'Angleterre, particulièrement les premiers albums de Essential Logic, The Raincoats et Gang of Four, furent, pour lui, remarquables par la tension, l'humour et le sens de la parodie, simplement uniques dans la musique populaire contemporaine. Ces enregistrements lui apparurent comme stimulés par le désir de communiquer des versions de faits sociaux partagés et pliés pour tester le « rock'n'roll » en tant que musique, culture et commerce, tout en maintenant une certaine distance méfiante.

Le journaliste y avoua également n'avoir jamais rencontré de musiciens interrogeant avec autant d'intensité la pop music ; avec une passion désorientée et une intelligence critique non déguisée assez forte pour pousser de nouveaux publics à s'y reconnaître :  idéalement, des publics suffisamment passionnés et critiques pour permettre aux musiciens de continuer à questionner leur travail.

Davantage qu'avec des scènes plus réalistes, comme le revival ska de 2-tone, la vie y est ici sauvée de la trivialité de l’existence quotidienne dans laquelle tout est seulement personnel et rien n'est mis en relation.

Il glissa également une mise en garde quant au principal risque encouru par Rough Trade : posture arty, solipsisme, supériorité morale, snobisme – l'impasse typique d'une avant-garde trop confortablement installée dans le concept.





L'article est disponible dans le recueil In the Fascist Bathroom, Punk in Pop Music, 1977-1992.

Mise à jour 24/07/2016

03/03/2014

Système D

Le concept de DIY n'est pas vraiment une idée nouvelle. Les antécédents notables remontent au garage, au mod, mais surtout au skiffle. Issu d'un revival jazz à la fin des années 50, ce mouvement populaire était largement composé d'amateurs jouant sur des instruments bricolés ou improvisés, et fut le détonateur de l'explosion de la beat music.

Le punk réactiva cette attitude et conviction que tout le monde peut faire de la musique.


Sorti en janvier 77 sur leur propre label, Spiral Scratch des Buzzocks fut probablement l'un des disques les plus importants du punk. Dans son sillage apparurent rapidement des centaines de groupes qui adoptèrent la tactique « do it yourself / release it youself ». Les Desperate Bicycles en étaient les plus fervents évangélistes, avec un discours proche de l'opposition situationniste au spectacle.


Leurs notes de pochettes participèrent à la démystification du processus de production, et leur cri de ralliement « It was easy, it was cheap : go and do it! » fédéra des régiments disparates de formation DIY, dont nombreuses figures de proue du postpunk : Swell Maps, Scritti Politti, Young Marble Giants ou des pionniers comme Thomas Leer ou Daniel Miller …


L'idée-clé du DIY dans son contexte original était clairement politique, textuellement et factuellement. Il se présentait comme un impératif moral, alors permis matériellement par l'émergence de technologies plus abordables. Au delà de ces avant-gardes se trouve un vaste arrière-pays de DIY britannique ; tout un underground fait de pochettes photocopiées, étiquettes tamponnées, sifflements de 2-pistes saturés, bourdonnement de bandes magnétiques détériorées. Ses hérauts se nomment O Level, Scrotum Poles, Instant Automatons, Thin Yoghurts, Danny & The Dressmakers ou encore The Homosexuals.

Depuis quelques années maintenant des archivistes creusent dans ce secteur et publient une grande quantité de compilations, malgré le nombre parfois très limité des pressages originaux et la nature périssable des sources d'enregistrement, parfois sorties uniquement sur cassette. L'imposante série de bootlegs Messthetics proposé par Hyped to Death en est la porte d'entrée principale.


Chuck Warner, fondateur et responsable du catalogue, insiste sur la distinction taxonomique entre postpunk et DIY pour des raisons plus pratiques qu'historiques. Alors que le postpunk se présente comme une différenciation et un dépassement du punk, le DIY se définit par la réduction des coûts de production pour enregistrer le moins cher et le plus vite possible. Le terme lui permet aussi d'éliminer l'association du postpunk avec un gros budget, une production ampoulée, des égos pesants, et ce truc affreux qu'est le goth (sic).

Tous ces compilations ne correspondent pas vraiment au messthetisme au sens Scrit', un très grand nombre de ces groupes penchent plutôt pour une punk-pop joyeusement décousue.







Souces / pour appronfondir :

Simon Reynolds, An update on DIY
Bob Stanley, Birth of the Uncool