Dans quelques jours sort le nouvel album de The Cure. Profitons-en pour revenir sur une version du postpunk, populaire mais volontairement mis de côté sur le blog.
Voici les deux premiers épisodes de la série The Cure, naissance de l'après punk livrée par Michka Assayas pour son podcast Very Good Trip sur France Inter.
Bonne écoute de cette grisaille magnétique qui plus de 40 ans plus tard n'en finit pas de nous captiver (sic) :
1: The Cure et les autres : le premier cri de l'après-punk (1978-1980)
2: The Cure et la naissance d'un certain après-punk, de l'Europe au Brésil
Malgré une naissance bicolore, le rock'n'roll puis la beat music
constituent une récupération des plans et de sonorités issues de
musiques noires par des blancs jouant initialement plutôt de la country
ou du skiffle. Mais ce fut leur façon non canonique d'appréhender le blues, le gospel, le boogie-woogie, le r'n'b ou même
le jazz qui engendra des nouveaux sons.
Plaçons-nous d'un point de vue moderniste. Donc exit la diversité des
styles vu comme une boite à outils pour construire des sous-genres par
accumulation de codes musicaux. Ici la découverte en dehors du cadre
permet de revenir radicalement sur les académismes. Comme
le post-impressionnisme s'inspirant des estampes japonaises ou encore
l’expressionnisme et le cubisme des masques africains.
Ainsi nous pûmes observer l'influence des musiques d'outre-mer aux
États-Unis avec, par exemple, du cubain dans le jazz et de l'hawaïen
dans le blues. L'archipel pacifique se retrouva aussi rapidement dans la country.
Dans l'ex-Empire Britannique, de nombreux musiciens étaient fascinés par les musiques jouées par les diasporas des anciennes colonies, et ainsi, découvrirent de nouvelles possibilités.
Nous arrivons à une question : pourquoi en France, nous n'avons jamais eu une réelle créolisation des musiques alternatives par des apports du Maghreb, de l'Afrique Subsaharienne, des Antilles ou de l'Asie du Sud-Est ?
Les enfants de l'immigration ont participé activement à injecter leurs cultures historiques dans des formats populaires. Comme dans ce rock métissé de l'après-punk :
L'influence de la new wave multiculturelle de The Clash est immense sur
les groupes des années 80, dont le « rock arabe » et le « rock latin » décrits par Paul Moreira dans Rock métis en France (1987). Mais leur musique fut envisagée d'un point de vue culturaliste et les productions trop souvent classées dans « musique folklorique » puis « musique de monde ».
Pourquoi la bohème locale blanche, venant d’environnements urbains cosmopolites, n'a jamais fait des emprunts à l'instar de leurs homologues outre-Manche ?
Dans Rock français 1977-83: chronique d'un rendez-vous manqué (2010), Laurent Jaoui pointe que la France est un pays de littérature, plus encore que de musique.Dans ce contexte, il est difficile d'imaginer une expression musicale française passant, paradoxalement, par autre chose que le texte. (...) La dite « chanson française » ne serait pas le prolongement d'une culture musicale mais la déclinaison d'un tradition littéraire. Alors que dans le rock, la forme musicale prévaut quitte à en éclipser le texte.
En considérant le rock français comme une reproduction de tendances
anglo-saxonnes, il doit satisfaire certaines canons esthétiques du moins
par filiation. Est-ce alors une déférence qui interdirait des
croisements stylistiques illégitimes ?
En considérant le rock français comme de la chanson française alternative, il doit reposer pour l'essentiel sur un texte mis en musique. Est-ce alors cette subordination au chant qui bloquerait les hybridations au cœur même de l'instrumental ?
A noter qu'il existe des formations « zouk punk » très récentes qui se placeraient en contre-exemples, s'il ne s'agissait pas clairement d'ironie postmoderne de niche :