24/07/2014

Vaguement froid

Lors des années 2000, des groupes comme Interpol ou Editors mirent en évidence l'influence et la grande popularité d'un certain esthétisme sonore et visuel post-punk qui s'était construit autour de Joy Division et le son Factory/Hannett, Echo & The Bunnymen, The Sound ou encore Comsat Angels.


Ce son du nord de l'Angleterre à l'aube des 80s était enraciné dans l'ouverture sonique de l'époque, mais penchait vers le côté le plus sombre et existentialiste du post-punk. Voir cette description de Simon Reynolds : des cieux dégagés et froids, impies et gris ardoise ; rock purifié par le punk, mais préparé à se risquer de nouveau à la grandeur ; des jeunes gens en manteau, le monde sur leurs épaules.





Il ne s'agit pas toujours ici de postpunk dans le genre des expérimentations de Londres, Sheffield ou Leeds : messthétisme, bruitisme synthétique indus, avant-funk ou dub apocalyptique. Mais plutôt d'un postpunk basé sur des guitares mélodiques et exaltantes, préférant la poésie à la politique, les Velvets et les Doors aux musiques noires. 

Certains commentateurs postérieurs ont qualifié ce climat d' « obscure post-punk » ou « depressive post-punk ». En France, c'est le terme « cold wave » qui a été le plus utilisé, dans un sens bien éloigné de la new musick. Pour A.S. Van Dorston, les plus grands groupes post-punk que vous n'avez jamais entendus se trouvent parmi les suiveurs de cette humeur nocturne et intense, incarnation originale de la "darkwave" : Modern Eon, The Opposition, Sad Lovers & Giants, The Stockholm Monsters, …



Très rapidement, ce versant du postpunk, plein d'overdubs de guitares, d'éclairs de synthés et de brumes atmosphériques évolua dans un large spectre de styles, du gros rock héroïque à l'indiepop plaintive. 



Son approche texturée se retrouva dans de nombreux paysages sonores éthérés et rêveurs, dans la sensibilité goth-lite façon 4AD ou au sein du continuum dreampop shoegaze postrock.


Le succès de certaines de ces formations post-Joy Division consolida fortement une conception romantique du post-punk. Dans Génération ExtrêmeFrédéric Thébault résume assez justement le récit idéaliste qui en découla : après avoir trop crié sans le moindre résultat, il ne reste plus aux punks qu'à pleurer sur leur triste sort.

Mise à jour 21/12/2021

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